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28 avril 2013 7 28 /04 /avril /2013 15:18


J'ai découvert les originalité des noms puritains en lisant Les Chroniques d'Alvin le Faiseur d'Orson Scott Card, situées dans un dix-neuvième siècle américain rêvé. Parmi les nombreux frères du héros (il est septième fils d'un septième fils), j'avais beaucoup ri des deux jumeaux baptisés Wastenot et Wantnot, d'après le dicton Waste not, want not (l'économie protège du besoin). Mais ce n'était que le début...     

Un des personnages sympathiques, tout frais débarqué d'Angleterre, s'appelle Verily, de son nom complet Verily I say unto you, Unless You become As A Little Child Ye Shall In No Wise Enter Into The Kingdom of Heaven (Matt 18:3). C'est le digne fils de Arise And Come Forth, dit Arise, et de He Wept (verset le plus court des évangiles) dite Wept.

Dans un registre nettement plus humoristique, la famille Carter du Disque-Monde de l'indispensable Terry Patchett a bien donné des noms de vertus à ses filles (Hope, Chastity, Prudence et Charity) mais s'est raté sur les garçons, pensant qu'il fallait leur donner des nom de péchés. On se retrouve donc avec cette joyeuse fratrie :

  • Bestiality Carter
  • Anger Carter
  • Jealousy Carter
  • Covetousness Carter
  • Deviousness Carter
  • et enfin Catastrophe Carter.

Ce qu'on s'amuse !   


Du coup quand il y a un ou deux lustres je suis tombée sur Curiosities of Puritan nomenclature, de Charles W. Bardsley, je me suis fait un point d'honneur de l'acheter, et je n'ai pas regretté. Vous pouvez le lire par vous-même chez l'excellent Public Domain Review, mais un simple coup d'œil à l'index suffit à désopiler la rate.

 

Par exemple, il y a les prénoms de vertu. En soit, rien de très extraordinaire : Hope et Faith sont toujours donnés, quoique la troisième vertu théologale (charité) soit moins populaire. Même en français, un prénom comme Clémence ou Clément ne choque personne. Mais là on les retrouve poussé à un point qui m'a fait repenser à la Farseer Trilogy de Robin Hobb ( Cycle de l'Assassin Royal) avec ses personnages appellés Verity, Chastity, Shrewd, Serenity, Celerity, Sacrifice, Dutiful, Swift, etc.

 

Tororo, fidèle d'entre les fidèles lecteurs, me signale en commentaire que cette mode n'avait pas échappé à Victor Hugo. Il écrit en effet dans Cromwell, acte I scène IX :

 

LAMBERT soupirant
Dites leur d'approcher. Quels sont vos noms, mes frères ?

UN DES NOUVEAUX CONJURÉS
Quoi-que-puissent-tramer-ceux-qui-vous-sont-contraires-
Louez-Dieu Pimpleton.

UN SECOND
Mort-au-péché Palmer.

UN TROISIÈME
Vis-pour-ressusciter-Jéroboam d'Emer.

LORD ROCHESTER bas à lord Roseberry
Que disent-ils ?

LORD ROSEBERRY, bas à lord Rochester
Ils ont l'habitude risible
D'entortiller leur nom d'un verset de la Bible.

 

Ceci est à rapprocher du très historique Praise-God Barebone, qui a donné son nom au Parlement des Barebones.

 

[La suite au prochain numéro]


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26 mars 2008 3 26 /03 /mars /2008 16:36
Je viens de terminer un petit livre tellement bien vu que c'est à se demander s'il on doit en rire ou en pleurer...
Ça s'appelle Le Journalisme sans peine, de Michel-Antoine Burnier et Patrick Rambaud (1997, Plon ), et c'est fabuleux.

Comment devenir journaliste? Rien de plus simple : mémorisez les clichés et les poncifs, peaufinez les tournures usées jusqu'à la corde, développez des métaphores obscures ou tout simplement ridicules et surtout, surtout, ne vous préoccuppez pas d'être compréhensible.

Le bouquin est un manuel parfait pour respecter la citation de ce bon vieux Wilde :

- But what is the difference between literature and journalism?
- Oh! Journalism is unreadable, and literature is not read.
Oscar Wilde, The Critic as an Artist.


Il s'agit de ne pas ménager sa peine pour faire gonfler sa prose : tout conflit est un bras de fer, n'importe quoi peut-être est sous haute surveillance, et on justifiera tout et le reste en ajoutant quelque-chose oblige...
Les maires deviennent des édiles, l'Académie française ne peut-être que la vieille dame du quai Conti, et les expressions antiques mal digérées volent dans tout les sens : on invoque Hippocrate (ou mieux, Hypocrate) à la moindre réforme de la sécu, et l'épée de Damoclès ne sait plus où donner de la tête.

Tous les exemple cités dans le livre, même les plus capillotractés sont extraits de la presse et de la radio nationales, et l'amusement n'en est que plus grand. Avec la manie d'utiliser des termes sportifs pour la politique, guerriers pour le sport, scolaires pour le gouvernement, politiques pour la culture, et toutes les combinaisons du même genre imaginables, on se retrouve avec des perles comme ces quelques phrases :


Le Parquet grince des dents.
La balle est maintenant dans le camp des slalomeurs.
Le Président de la république a administré un remède de cheval
à son Premier ministre pour le remettre en selle.


Joli, non ?

Je ne saurais trop recommander la lecture de ce livre salutaire à tous ceux qui envisagent un jour de rédiger quelques lignes pour quelque média que ce soit.
Car, sans pour autant écrire dans un style purement technique,  il doit être possible de garder sous contrôle l'envie bien naturelle de monter son style en neige...
D'ailleurs, pas plus tard que dans la phrase précédente,  j'ai résisté à l'envie de dire "tenir la bride à" et "garder en laisse". Hé oui, rester à peu près lisible est le résultat d'une discipline de tous les intants !

Et en bonus, je vous donne cette jolie phrase entendue sur France Info pendant la rédaction de cet article :

Le Japon exporte tout de même plus de trois cents tonnes de mozarelle par an !

Hum. Exporte. Mais bien sûr...



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5 septembre 2007 3 05 /09 /septembre /2007 12:31
genlis.jpgConnaissez-vous  Madame de Genlis ? Non ? Rassurez-vous, je n'en avais moi-même jamais entendu parler jusqu'à ce que j 'achète  dans la collection Folio 2 euros sa Femme auteur, par curiosité familiale.

Cela se lit vite et bien, même si la morale de l'histoire peut sembler paradoxale sous la plume d'une  femme de lettres reconnue :

Si vous deveniez auteur, vous perdriez la bienveillance des femmes, l'appui des hommes, vous sortiriez de votre classe sans être admise dans la leur. Ils n'adopteront jamais une femme auteur à mérite égal, ils en seront plus jaloux que d'un homme. Ils ne nous permettront jamais de les égaler, ni dans les sciences, ni dans la littérature ; car, avec l'éducation que nous recevons, ce serait les surpasser.
Cette lucidité un peu amère m'a fait penser à Des femmes et de leur éducation, de Choderlos de Laclos (Mille et Une Nuits : décidément, les petits formats ont le chic de ressortir de vieux textes aussi oubliés qu'intéressants), mais  il ne s'agit pas de les confondre :  le vieux Pierre est autrement plus subversif de cette dame, qui fut après  tout "gouverneur" du jeune Louis-Philippe. Un petit extrait en passant, juste pour vous montrer de quel bois il se chauffait :
Ô femmes ! [...] Si au récit de vos malheurs et de vos pertes, [...] vous rougissez de honte et de colère, [...] si vous brûlez du noble désir de ressaisir vos avantages, de rentrer dans la plénitude de votre être, ne vous laisser plus abuser par de trompeuses promesses, n'attendez point les secours des hommes auteurs de vos maux : ils n'ont ni la volonté, ni la puissance de les finir, et comment pourraient-ils former des femmes devant lesquelles ils seraient forcés de rougir ? Apprenez qu'on ne sort de l'esclavage que par une grande révolution.
Mais je clos là cette digression.
Pour ce qui est du style, on retrouve dans cette courte histoire (80 pages) de Mme de Genlis toute une façon d'écrire caractéristique de son temps, signalée en particulier par les petites phrases qu'on dirait toutes prêtes à aller composer un recueil d'aphorismes :

L'homme qui désirerait être une femme serait un lâche, la femme qui voudrait pouvoir devenir un homme ne serait déjà plus une femme. (p.27)

L'amour n'apprécie que le temps présent, c'est de tous les sentiments celui qui s'occupe le moins de l'avenir ; il craint d'y jeter les yeux, il n'est  pas sûr de s'y retrouver. (p.60)
Et puis bien sûr, il y a l'inévitables portrait de caractère, farci de ses douze points-virgules par ligne :
Elle avait cette sensibilité et cette flexibilité d'organisation qui produisent la diversité des talents, mais qui ne sont pas sans inconvénient pour le caractère ; une extrême curiosité, de la facilité pour apprendre la rendaient capable de se livrer à des études sérieuses ; un goût passionné pour les arts lui faisait aimer tous les amusements frivoles. La variété de ses occupation donnait à sa conduite l'apparence et les résultats de l'inconstance ; elle voulut apprendre un si grand nombre de choses, et cultiver tant de talents, qu'elle n'eut jamais la possibilité de réfléchir et de travailler sur elle-même. Pour s'épargner la peine de corriger ses défauts, elle se persuada qu'elle pourrait les compenser en exaltant ses vertus, elle ne parvint qu'à gâter ses bonnes qualités par l'excès qui les fait dégénérer ou qui les rend dangereuses. [...] Une sensibilité excessive lui rendit inutile la finesse et la pénétration de l'esprit.
Et ça y est, en lisant ça, ma paranoïa lectorale me reprend...

NB :  La Femme auteur est tiré du tome troisième des Nouveaux contes moraux et nouvelles historiques, publié à Paris, chez Lecointre et Durey, 1825.
L'illustration est un détail d'un tableau de Jean-Baptiste Mauzaisse, trouvé sur cette page fort intéressante du musée des Arts et Métiers. Cette dame était décidément pleine de ressource !

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9 juin 2007 6 09 /06 /juin /2007 00:00
ogre.jpgJ'ai découvert il y a peu un bar-resto-salle-de-concert remarquable appellé l'Ogre à Plumes.
On peut y assister à des lectures, des impros, ou tout simplement venir y siroter un verre en profitant du Wifi, et surtout des étagères croulant de livres sur tous les murs...
Un bon bouquin, un gros fauteuil en cuir dans lequel se lover, le tout pas trop loin de mes pénates... Que demander de plus?

L'Île des gauchers

gauchers.jpgC'est là que j'ai commencé à lire L'Île des gauchers. On m'a dit pis que pendre d'Alexandre Jardin, l'auteur, mais le livre m'a néanmoins beaucoup plu. Drôle et absurde, suivant un peu les traces d'une autre île littéraire, celle des pingouins.
D'après certaines critiques, le roman reprend des idées déjà présentes dans les bouquins précédent de l'auteur, mais je ne peux pas juser, vu que je n'avais rien lu de lu jusqu'ici.
mais on ne peut qu'être amusé par l'idée d'une île peuplée de gauchers tout dévoués à une unique cause : apprendre à aimer leur conjoint de la meilleurs façon possible. Il y a d'excellentes choses, d'autres plus classiques, d'autres enfin qui rentrent dans les deux catégories : le butler Algernon est classicissime, mais fabuleux... "Gauchers oui, mais gauchers anglais !".
Le livre aurait peut-être bénéficié de plus de concision, l'auteur n'atant pas avare de répétitions et certaines péripéties étirant la fin en longueur, mais rien de vraiment fâcheux en vérité : le livre se lit sans difficulté, en souriant beaucoup, à la condition de ne pas se mettre, comme je ne le fais que trop dans la littérature d'imagination, à considérer sérieusement la faisabilité du système.

Ce qui me dépasse, c'est que dans certains commentaires  les lecteurs se demandent si l'île existe vraiment...Je dois être cynique.
Certes, le livre se clôt par une chronologie de l'île et par des données économiques (Exportations: Ciseaux pour gauchers, 70%...), mais de là à prendre tout ça pour argent comptant... sans compter que dans ce cas ils passent à côté du principal intérêt du livre.
Enfin bon...

Et puis une petite citation, prise tout au début du texte, pour vous donner une idée du pied sur lequel part le récit :
Ces interrogations s'entrechoquaient dans son esprit avec une violence depuis la mort d'Harold, son chimpanzé et ami de toujours, presque un frère.
C'est le début d'une grande aventure...

J'arrête ici ce retour inespéré dans la catégorie Lectures... Et je fais une note mentale de ramener le bouquin à L'Ogre à la première occasion : ils me l'ont prêté avec une bonne grâce qui les honore.

PS : pour les amateurs d'îles imaginaires, une référence  fantastique : Utopies insulaires à la bibliothèque insulaire.
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21 février 2007 3 21 /02 /février /2007 12:40
Les Danaïdes étaient condamnées à remplir éternellement un tonneau sans fond qui se vidait au fur et à mesure de leurs efforts.
J'ai mon propre tonneau : il est orné d'un Post-it marqué I ain't read yet! (Dém et quelques autres saisiront la référence), et prend la forme d'une étagère bibliothèque pleine qui se remplit plus vite que je ne la vide.

Et la dernière fois que je me suis connectée à mon compte Amazon, j'ai failli m'étrangler :


Rien de bien grave me direz-vous, il suffit que je mette les moins urgents/intéressants de côté, et on verra ça plus tard.
Certes.
Mais je le fait déjà! et voilà ce qu'on trouve en bas de la page :


Je ne veux pas savoir le total en euros...

Afterthought :
Ca m'a rappellé qu'un temps j'avais fait une wishlist (mon frère ne sait paraît-il jamais quoi m'offrir). Finalement elle n'a jamais servi, et même en la remettant à jour, ça me fait une quarantaine de livres supplémentaires à transférer à ma liste...

Sans tenir  compte  de la bibliothèque des autres (j'emprunte sans vergogne) et de la collectivité (Paris je t'aime), ni de la liste papier que je tiens des livres qu'il faut que je lise urgemment, j'arrive  donc aux environs de 250 bouquins.
Je n'arrive pas à savoir si c'est formidable ou complètement affeux.
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30 avril 2006 7 30 /04 /avril /2006 00:00
Le Possédé, de Camille Lemonnier

Il y a des livres qui relèvent autant de l'exercice de style que de la poésie en prose :
Le possédé du belge Camille Lemonnier (1844-1913) en fait partie.
(Editions Séguier, dans la collection délicieusement nommée Bibliothèque décadente)

Le nom ne vous dit peut-être rien, et je n'en avais jamais entendu parler avant de lire ce volume.
L'histoire en elle-même est classique : un magistrat confit de certitude tombe fou amoureux de la jeune gouvernante des enfants, et tombe progressivement sous sa coupe tyrannique et sadique, mettant sa famille au désespoir.

Le style, quant à lui, est difficilement descriptible : précieux et naturaliste (on l'a appelé "le Zola belge"), onirique et réaliste, psychologique et symbolique à la fois, il semble prendre un malin plaisir à combiner les opposés.

Cette indépendance stylistique, couplée à une licence qui scandalisa à l'époque, est caractéristique de Lemonnier, qui fut prolifique et révolutionnaire, et posa les jalons de la littérature belge moderne. Je ne sais si l'obscurité dans laquelle il me semble être tombé est due à mon inculture, à l'ignorance française quanà à leurs voisins belges, ou à un réel oubli général.

Quoi qu'il en soit, ça vaut le détour, ne serait-ce que pour les mots, car :

Aucun écrivain du XIXe siècle, si ce n'est Victor Hugo, n'a possédé, comme Camille Lemonnier, les richesses du dictionnaire, n'a disposé pour formuler sa pensée ou ses sensations d'un nombre aussi considérable de mots: nul ne s'est grisé comme lui de sa puissance verbale.

Tout le monde n'apprécie pas, cependant :

Sa prose enflée charrie les termes rares et précieux, les archaïsmes et les néologismes, et les mots arrachés aux jargons des provinces. Il y a pléthore, et cette pléthore menace de crever, pour ainsi dire, la peau de la phrase.
Antonin Bunard

Pléthore? Oui, indubitablement. La liste des mots que j'ai noté au cours de ma lecture parce qu'ils me paraissaient rares, tirés par les cheveux, voire obscurs, commence ainsi :
et elle continue sur des colonnes entières!
Alors pour la peine, je fairai un deuxième article à part, aussi complet que possible, qui ira dans la catégorie adéquate. Quand j'aurais le temps...
[Edit : C'est fait!]

Ce qui me plait chez cet auteur, c'est aussi la verve et l'énergie avec lesquelles il n'hésita pas à secouer le milieu littéraire de son temps : il refusa catégoriquement de se laisser coller des étiquettes, et n'a pas de mots assez durs pour ses collègues confinés à leur niche bien confortable et bien rentable. Je sais que c'est un peu long, mais si je m'écoutais, je vous mettrais l'intégralité de ses quelques pages d'Esthétique (Dames de volupté, 1892).
Lisez donc :

Rien, cependant, n'aide l'industrie de l'homme de lettres comme une rubrique qui l'assimile aux plénipotentiaires du caoutchouc vulcanisé, des prothèses dentaires ou du clysopompe hygiénique, détenteurs d'un indubitable brevet, « Monsieur X..., l'observateur bien connu des moeurs de barrières » ou « Monsieur Y..., le délicat analyste des ménages mal assortis », ou « Monsieur Z...,  le psychologue raffiné à qui l'on doit tant d'études palpitantes sur l'état d'âme des marchands de pains d'épice et de saucissons »sont des adjuvants sans équivalent pour la propagation d'un honnête trafic, si peu littéraire qu'il soit.
(...)

Les frictions réitérées par lesquelles opère ce système ingénieux de publicité surpassent les meilleurs massages pour inculquer aux crânes les plus obscurs les bienfaits de l'article manufacturé par l'adroit fabricant. Il ne s'agit plus alors, pour aboutir à un productif soutirage d'écus et de renommée, que de sécréter avec ponctualité un encre débile, d'où préalablement tout principe tonique a été éliminé.
(...)

Il importe, en effet, pour l'écoulement du produit, que le client soit rassuré quant à l'homogénéité et à la perdurabilité du mode de fabricat. On se fournit chez un auteur pour s'octroyer, selon une hygiène en rapport avec la température, un sédatif ou un cathérétique déjà expérimentés. Et quel déchet si d'abusifs et aléatoires ingrédients risquent d'aliéner la vertu des habituels dosages!
    Eh bien, c'est contre cette commerciale notion de la personnalité que je m'insurge! l'art répugne à médicamenter les gastralgiques indolents d'après un codex stimulateur de bonnes digestions et nie toute analogie avec les officines vénales.
(...)

    Le jour où, résigné à me confiner, maître d'un lopin, dans mon enclos, je ne regarderai plus vers l'horizon, là-bas, qu'on referme sur moi ma bière : les vers, comme un fromage, auront mangé ma cervelle.

Cela vous donne une idée de sa façon d'écrire : tout sauf sobre, mais énergique et, à mon sens, plaisant et efficace.

En attendant ce bouquin me laisse avec une impression étrange qui rappelle celle donnée par la lecture de The Man who was Thursday : même mélange de réalité terre-à-terre, de solide psychologie des personnage, et de délire complet, dans le genre à vous faire perdre le sommeil si vous y réfléchissez trop.


The Man Who Was Thursday, de G.K Chesterton,

Comment ça, je ne vous en ai pas encore parlé? Aie, mon projet de carnet de lecture à jour semble méchamment pris dans les fondrières du temps qui passe...
Mais si, souvenez-vous : en novembre, je vous en avais donné une citation qui parlait de "poète respectable". Ah, vous voyez bien!

Et comme il n'est jamais trop tard pour bien faire  laissez-moi vous brosser à grands traits le thème du bouquin :
Le narrateur est un espion chargé d'infiltrer un group(uscul)e anarchiste, et se retrouvé élu au sein du conseil central, composé de sept délégués dont les noms de code sont des jours de la semaine. Notre héros devient donc Thursday (Jeudi), et vit dans la terreur d'être découvert par les autres, en particulier Sunday, le chef suprême gigantesque au charisme paralysant. Il découvrira cependant que les choses ne sont pas forcément ce qu'elles semblent être, et l'effroyable fuite finale pour échapper à des masques marque le tournant surréaliste du livre, tranformé en une espèce de cauchemar symbolique.
À moins que ça n'ait commencé plus tôt...
Car le titre complet du roman est bien The Man Who Was Thursday : A Nightmare...


PS : Comme je l'expliquais il y a longtemps déjà, c'est ce livre qui donne son prénom à l'héroïne de Jasper Fforde, Thursday Next, que j'attend désespérément...

PS2 : Pour les anglophones, le texte est disponible gratuitement en version électronique (Projet Gutemberg, ebook...), ou en encre sur papier en se lançant dans le bookcrossing...

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21 décembre 2005 3 21 /12 /décembre /2005 02:36
Voici la suite tant attendue de mon article traitant de la littérature des mondes parallèles. Je vous y promettait, il y a deux mois déjà, de la medieval fantasy, et de l'authentique fantastique.
Les voici, les voilà.

Les lions d'Al-Rassan, de Guy Gavriel Kay
Traduit de l'anglais par Elisabeth Vonarburg, éditions J'ai Lu, 2005

Nous nous retrouvons ici non dans un univers moderne qui ressemble au notre, tout en ayant bifurqué à moment donné de l'histoire, comme dans l'Affaire Jane Eyre, mais dans un monde médiéval très loin de nous, où les différentes avec la réalité sont flagrantes et fondamentales. Un exemple parmi d'autre : ce monde possède deux lunes.

Pourtant, très vite, la similitude des choses saute aux yeux. Dans une péninsule méridionale appellée l'Espéragne, dont deux peuples aux religions opposées se disputent la souveraineté, on voit les rois se livrer à des guerres fratricides, tandis que des califes tentent de rescussiter la gloire moribonde du Royaume d'Al-Rassan, et qu'un peuple errant vit s'écrouler la précaire sécurité dont ils avaient bénéficié pendant la paix.
Autant vous dire que les sous-titres ne sont pas nécessaires pour voir dans ces Jaddites, Asharites et Kindrath les Chrétiens, Maures et Juifs d'une Reconquista d'autant plus saisissante qu'elle est parée des artifices de la fiction.
Les héros choisis par l'auteur, un dans chaque peuple, sont d'une étonnante profondeur pour des personnages archétypaux, et l'auteur excelle à décrire ce qu'une mauvaise quatrième de couverture appellerait des destinées flamboyantes prises dans la tourmente de l'histoire.
Il réserve d'aillleurs au lecteur quelques surprises bien ménagées, en le poussant à faire de lui-même de fausse inductions...

Après avoir lu ce livres et quelques remarques générales sur l'oeuvre de G.G.Kay, l'envie ne me manque pas d'aller voir si ses autres ouvrrages font preuve d ela même originalité. A suivre, donc!

Par ailleurs, il paraît  qu'un film est prévu sur la base de ce livre, mais l'annonce date de près d'un an et le projet semble en stand-by, avec une sortie préve pour 2007.
La qualité d'un livre ne prédit en rien celle du film subséquent, mais il y a sans doute plus d'espoir pour celui-ci que pour une adaptation d'un pur navet, non? J'essaye de rester optimiste, ne me découragez pas...

Pour en savoir plus :

De flammes et d'ombre, de Kurt Steiner

Malgré son pseudonyme, l'auteur est tout ce qu'il y a de plus franchouillard et s'appelle de son vrai nom André Ruellan, assez connu des amateurs de fantastique des années soixante et soixante-dix.

J'ai piqué le vieux poche à mon auguste géniteur, qui rentre indubitablement dans cette catégorie, et j'y ai trouvé un intérêt certain : ce roman décrit comment la vie d'un simple docteur de campagne (une campagne anglaise très convaincante d'ailleurs) se désagrère inéluctablement à partir d'un ou deux événements étranges.
Le caractère cauchemardesque de sentir que la réalité vous échappe prend des proportions dantesques lorsqu'au titre de médecin vous avez charge d'âmes, et que vos inexplicables erreurs entraînent des décès à répétition.
Je ne crois pas avoir l'estomac particulièrement fragile (à 15 ans, je taillais des cerveaux humains à joyeux coups de scalpel), et pourtant la description de son impuissance devant la mort en couches d'une patiente par une spectaculaire hémorrhagie m'aurait presque donné envie de pleurer.
Sans trop déflorer l'histoire, contentons-nous de dire que le cauchemar ne s'arrête pas là, et que la fin, qui relève autant du fantastique que de la parabole, ne manque pas d'élégance.

L'édition Fleuve noir que j'ai entre les mains doit être épuisée depuis vingt-cinq ans, mais le texte est disponible, avec un autre roman et une flopée de nouvelles, dans une édition plus récente (image ci-contre)

Ah, et mon père n'a pas aimé.

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19 décembre 2005 1 19 /12 /décembre /2005 00:00
Et oui, il m'arrive même de lire des livres sérieux qui ne racontent même pas des histoires inventées...Un peu de non-fiction, donc.

Réflexions sur la question juive
, de Jean-Paul Sartre
couv
Ce bouquin, lu un peu par hasard (je ne traîne pas de mon propre chef devant le rayon philo de mes bibliothèques, trop à faire ailleurs), s'est révélé très éclairant sur la situation de l'antisémitisme en France au sortir de la guerre (1946), et d'une grande lucidité sur l'aspect sociologique, voire psychologique du phénomène.
Il complète de façon pertinente une (assez vieille) enquête journalistique lue l'an dernier sur la Cagoule, qui présentait l'antisémitisme français latent d'une façon qui faisait froid dans le dos.
Au-delà de l'intérêt historique, l'analyse de ce livre assez court et plutôt facile d'accès pour du Sartre est utilement généralisable à beaucoup de préjugés hélas répandus.

“Le Juif est un homme que les autres hommes tiennent pour Juif : voilà la vérité simple d’où il faut partir.
En ce sens, le démocrate a raison contre l’antisémite : c’est l’antisémite qui
fait le Juif.”


Et vos enfants ne saurons pas lire...ni compter! de Marc Le Bris

couvEncore une fois en pleine actualité! (Ne vous arrêtez pas au titre)
Lu il a trois-quatre semaines, ce pamphlet d'un instit' extrêmement remonté contre la pédagogique moderne (ou ce qu'elle a été), en particulier la mathématique Bourbakiste au primaire, et la méthode globale d'apprentissage de la lecture.
Évidemment biaisé (ça va souvent avec pamphlet), il n'en reste pas moins, intéressant, convaincant au moins sur les points les plus importants, intructif, et, ce qui ne gâche rien, agréable à lire.
Par ailleurs Gilles de Robien arrive tout de même longtemps après la bataille sur la question, mais il faut bien remplir ses conférences de presse, et puis le mettre en place avant le début de l'année scolaire, ce serait vraiment trop facile.
Chez Stock, 2004.
Une présentation du bouquin par ici, une interviou par là.

Digression (je préfère prévenir)
Un passage annexe du livre m'a marquée qui raconte les réponses des enfants lorsqu'on leur demande ce qu'il feraient si, un beau matin, tous les adultes avaient disparu. Pas de parents, pas de voisins, pas de maîtresse, plus que des gosses. Que feraient-ils?
Faire la grasse ma', manger des gâteaux, jouer? Non.
Réponse unanime et reproductible d'une classe à l'autre :
Casser des choses.
Au premier abord, ça paraît logique, vu que casser le vase de grand'maman est la bêtise ultime, mais ça prend vite des proportion délirantes : ils veulent tout casser, des fenêtres au mobilier de leur chambre.
Quand les autres pulsions se réveillent, ils foncent à la boulangerie, mais la saccagent soigneusement avant la vider, se jettent sur les ordis non pas pour jouer (ou pour télécharger du porno), mais pour les casser... C'est assez effrayant, mais pas si surprenant que ça.
Et je dois avouer que j'apprécie quand des gens autorisés, et a priori peu soupçonnable de détester les gosses cassent un peu le mythe des petites tête blondes pleines d'innocence.
Mais c'est mon côté cynique qui parle, ne faites pas attention.



Remarque bibliographique
    J'ai eu droit à un commentaire désagréble, mais contenant, sous une bonne couche de mépris, une certaine vérité : je ne donne pas toujours les références complètes des bouquins dont je parle.
Cela vous a-t-il posé des problèmes? En général, les liens de l'articles proposent tout le nécessaire pour se procurer l'ouvrage, mais je veux bien faire un effort, surtout si ça intéresse des gens.
    Par ailleurs, et de façon beaucoup plus civile, il m'a été suggéré que le hotlinking des images n'était pas une pratique très recommandable.
C'est vrai. Je bats ma coulpe. Promis j'arrête... au prochain post!

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9 décembre 2005 5 09 /12 /décembre /2005 00:53
Apostille au nom de la rose, d'Umberto Eco

Voilà un tout petit volume de même pas cent pages, vendu au prix d'un jambon-beurre, et que tous les amateurs d'Umberto Eco devraient lire.
Comme son nom l'indique, cet opuscule se veut une réponse aux innombrables questions dont l'auteur a été assailli au sujet du Nom de la Rose :
pourquoi la rose, quelle interprétation lui donner, quelle est la part de la vérité historique et celle de l'imagination pure, pourquoi, pourquoi pourquoi...
A croire que la paternité d'un roman passionnant offre du même coup celle des lecteurs, valant à l'auteur un déluge de questions parfois sans réponse dont on aurait cru seule capable l'opiniâtreté enfantine...   
Mais il ne se contente pas d'expliquer, entre autres, le pourquoi du titre, de la localisation, du choix du Moyen-Âge comme toile de fond, ou d'Adso comme narrateur.
On y apprend pourquoi l'action ne pouvait avoir lieu qu'à la fin novembre de cette année-là, ni avant, ni après, et comment Eco se vit obligé de potasser les littératures les plus suspectes pour dénicher un poison remplissant son cahier des charges, ce qui laisse songeur : sans doute, est-ce une marque du talent que le résultat de tant  de travail méticuleux soit une impression de facilité et d'évidence pour le lecteur. A moins que, plus prosaïquement, une oeuvre sentant la sueur avoue en fait un manque d'icelle...

Mais Eco est, bien avant d'être écrivain ou transcendant satrape, d'abord un sémioticien, un spécialiste des signes et du langage. Ce petit bouquin vaut donc aussi par les généralités qu'il y fait. Sans vouloir épuiser la matière du livre, en voici deux exemples.

    En stylistique, on apprend, en se rendant compte qu'on l'avait toujours su, la pertinente distinction anglo-saxonne entre novel et romance, deux types de romans bien différents.

    En philosophie de la littérature, on a droit à une réflexion fort intéressante sur les notions nébuleuses de littérature facile, populaire, souvent opposée à une littérature de qualité. Certes, si on construit un livre en utilisant délibérément toutes les ficelles connues pour plaire au plus grand nombre, le résultat a peu de chance de marquer la littérature mondiale, si ce n'est par sa prolificité.

Mais Eco s'efforce de nous montrer que l'alternative ne se limite pas à des œuvres absconses qui découragent dès le début de la lecture les lecteurs auxquels elles ne sont pas destinées : l'auteur peut aussi former le lecteur, lui donner progressivement les moyens d'intégrer les notions nécessaires au projet de l'auteur, au lieu de n'accepter que ceux qui les possèdent déjà.
Venant de quelqu'un d'autre, cela pourrait paraître utopique, mais Le Nom de la Rose, roman à clefs médiéval et best-seller international, donne à Eco une légitimité unique pour nous convaincre de la faisabilité de ce beau projet.

Il y a bien sûr beaucoup d'autres choses, et surtout beaucoup de citations et d'allusions à d'autres oeuvres plus ou moins connues.
En particulier, Eco évoque un texte de E.A. Poe décrivant la façon dont il a écrit l'un de ses plus célèbres poèmes, Le Corbeau / The Raven, mais ce soir-là, soit que la chance fût contre moi, soit que je m'y soit prise comme un manche, pas moyen de tirer qui que ce soit de plus de Google (je cherchais le texte en anglais, mais le titre n'a rien à voir avec celui de la traduction, ce qui explique au moins partiellement le mystère).

La Genèse d'un poème, d'E.A. Poe

Et puis il y a peu, dans la dernière fournée maternelle, j'héritai d'un Poe, Histoires grotesques et sérieuses, le troisième recueil traduit par Baudelaire après les Histoires extraordinaires et les Nouvelles Histoires extraordinaires. Et devinez donc quel est le dernier texte? La Genèse d'un poème (Philosophy of Composition)

C'est très court, mais fort intéressant., puisqu'on y apprend qu'il  a construit ce poème à l'envers. Bien loin de l'idéal romantique, où les poèmes sont dictés aux disciples des Muses dans une sorte de transe artististique, Poe décrit une construction extrêmement méthodique du poème, en quelque sorte à l'envers.

1/ La longueur du poème : il décide d'une limite à 100 vers pour permettre une lecture d'une seule traite.

2/ Le ton : en l'occurrence, sombre.

3/ Comment y arriver? Entre autres, avec un refrain.
Pour faciliter sa manipulation, un refrain d'un seul mot est jugé préférable.
Quel mot? Un mot qui contienne des sonorités sombres et ces considérations me menèrent inévitablement à l'o long, comme la voyelle la plus sonore, associé à l'r comme étant la consonne la plus vigoureuse (*), et un sens en accord avec le ton.
Nevermore (jamais plus) est donc le candidat rêvé.

4/ Quelle structure pourrait justifier la répétition de "Jamais plus"? Une série de questions, et une réponse toujours identique.
Pourquoi toujours identique? L'idée de l'oiseau parleur lui vient à l'esprit, et The Raven a bien faillit s'appeller The Parakeet (Le perroquet) ce qui, admettons-le, aurait sérieusement ôté au symbolisme du poème...
Heureusement, les exigences du ton prennent le dessus, et le psittacidé cède la place au psychopompe

5/ Ceci posé, quel pourrait être le thème des questions, pour que la réponse "Nevermore" ait le plus d'effet possible? La mort bien sûr, et plus encore la mort d'une femme aimée, et c'est ainsi qu'apparait le personnage principal, amant éploré de feue la belle Lénore.

6/ Et là, d'après Poe, le plus dur est fait : un corbeau, un étudiant déprimé, un crescendo de questions, et toujours Nevermore comme réponse.

Il ajoute un peu de considérations techniques sur la versification :

Il va sans dire que je ne prétends à aucune originalité dans le rythme ou dans le mètre du Corbeau. Le premier est trochaïque ; le second se compose d'un vers octomètre acatalectique, alternant avec un heptamètre catalectique (...) et se termine par un tétramètre catalectique.

Je ne sais pas pour vous, mais moi ça me fait me sentir très, très bête, mais  très soulagée aussi : la langue française ne connaissant pas la distinction entre voyelles courtes et longues (ou plutôt atones et toniques), la versification ne tient compte que du nombre de syllabes et des rimes, pas de la scansion.
Ouf, on l'a échappé belle...

Bon voilà, vous savez tout : une fois qu'on a la taille, le sujet, et le refrain d'un poème, tout le monde peut l'écrire, non?
Ben non...
Comme quoi, malgré ses efforts méthodiques, il y a tout de même une bonne partie de son travail que Poe n'effleure même pas. Mais à l'impossible nul n'est tenu...



(*) Ce qui veut dire que lire The Raven avec un accent britannique est une hérésie, puisqu'il prononce Nevermore "Nèveuh-moh" (l'alphabet phonétique ne passe pas sur ce blog).


Le Corbeau sur Wikisource :
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7 décembre 2005 3 07 /12 /décembre /2005 00:00
La mort du roi Tsongor, de Laurent Gaudé

Un roman court et au parfum de tragédie antique, avec quelque chose d'à la fois très littéraire et très oral qui traverse le texte, un peu comme si on avait mis par écrit une légende déjà transmise de bouche à oreille depuis des générations.
La quatrième de couverture essaye de décrire l'histoire :

Dans une Antiquité imaginaire, le vieux Tsongor, roi de Massaba, souverain d'un empire immense, s'apprête à marier sa fille. Mais au jour des fiançailles, un deuxième prétendant surgit. La guerre éclate : c'est Troie assiégée, c'est Thèbes livrée à la haine.
 

Je ne sais pas si la comparaison à Troie encourage à la lecture, mais elle est pertinente  : c'est vraiment une légende intemporelle, qu'on placerait aussi bien en Attique que chez les Pharaons. Le personnage de Katabolonga, serviteur, veilleur, et épée de Damoclès du roi vaut à lui tout seul de lire le roman.

Très intéressant de mon point de vue, ce bouquin m'a donc donné envie de m'attaquer à son oeuvre plus récente et plus connue, le Soleil des Scorta, qui a remporté rien moins que le prix Goncourt, pour voir s'il avait su y conserver ce ton d'aède. (Pour ceux qui aiment les combo, il y a un coffret qui réuni les deux romans)

Et en plus l'auteur est le frère d'un collègue du copain d'une amie à moi, qui est très sympa. (Vous suivez?)
Que demander de plus?
Ah oui, la couverture est superbe, c'est dans l'excellente collection Babel, et ce n'est pas cher.

Les dieux ont soif, d'Anatole France


marat Comme pour les autres romans que j'ai pu lire de lui (La Rotisserie de la Reine Pédauque, L'île aux Pingouins...) j'ai beaucoup aimé ce livre, mais je l'ai trouvé encore plus sombre que les autres, ce qui n'est pas rien.
Il faut dire que même avec tout le cynisme du monde, la Révolution française est une période sanglante et amère, où les idéaux ternissent bien vite en face de la réalité.
Le titre, intriguant au premier aborde, ne garde pas longtemps son secret. De quoi les dieux ont-ils soif?
La réponse est dans la traduction anglaise : The Gods Will Have Blood (Les dieux auront du sang). C'est d'ailleurs cette édition étrangère que j'ai choisie comme illustration, car elle représente la célébrissime mort de Marat, qui est un événement important de l'histoire (que le H soit majuscule ou non, d'ailleurs).


Ici c'est le coeur d'un jeune artiste peintre idéaliste au possible, et profondément sincère qui se patine au contact des folies partisanes, et le lecteur assiste désemparé à la création d'un nouveau personnage de juge fanatique.
Ceux qui connaisssent la période seront impressionnés par l'exactitude historique du récit, tandis que ceux qui, comme moi, n'en ont guère retenu que les cocardes à l'école à l'occasion du bicentenaire se diront que décidément, les idées généreuses ne sont souvent belles que de loin.
Pas haletant, ce livre rentre plutôt dans la catégorie de ceux qu'ont met un moment à lire, parce qu'il est plein de faits d'une part et de réflexions douces-amères de l'autre.
Ironique, désabusé et mélancolique.

(J'en ai tiré une citation il y a longtemps déjà).

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Edito

Soyez les bienvenus sur ce petit blog sans ligne éditoriale fixe, qui échoue à mourir depuis 2005.
La fréquence de mise à jour se veut quotidienne au mieux (par ce que je suis de nature optimiste), trimestrielle au pire (parce que je suis velléitaire bien plus encore).

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